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Mardi 3 avril 2012 à 12:33

Je ne sais plus comment j’avais atterri dans ce lit, je ne sais plus ce que je faisais dans les bras de mon meilleur ami. Jacob, tellement complexe, tellement désirable… lui, il aurait pu me prendre par la main, il aurait pu me faire escalader l’arbre de la connaissance. Pourquoi je ne l’ai pas aimé à m’en déchirer l’âme, pourquoi je ne l’ai pas choisi, je ne m’en souviens plus, je n’ai pas envie de m’en souvenir. Je suppose que j’ai préféré me sauver de son emprise, de ses yeux qui embrasent, je suppose que j’ai eu peur d’être dévastée, d’être balayée par lui et par son charisme. J’ai trop d’admiration pour lui pour qu’il ne m’ait pas écrasé. J’ai trop d’ego pour accepter de me laisser façonner, de me fondre en lui. Parfois j’ai l’impression que nous résonnons au même rythme, que nous vibrons ensemble. Peut-être que j’avais peur de perdre ça en m’abandonnant à lui, en lui offrant quelque chose dont il n’aurait pas voulu sans doute, peur de me brûler, de rejoindre la cohorte des insignifiants que nous méprisions de concert. Alors j’ai pris le large, j’ai mis de la distance et maintenant nous ne savons plus quoi nous dire. C’était pourtant un coup de foudre, amical à défaut d’autre chose, je me suis reconnue en lui, il était moi en mieux, j’aurai voulu laisser ma marque dans sa peau comme un loup marque son territoire. Nous n’avons pas tenu la distance.
Et puis ce soir. Je crois que c’était une fête, il faut toujours une fête pour s’endormir dans des draps qui ne sont pas familiers, dans des bras qui ne sont pas familiers. J’ouvre doucement les yeux et je le vois, Jacob, le regard rivé sur moi, si près de mon visage, évidemment il ne peut pas dormir, lui et moi partageons cette haine pour le sommeil toujours fuyant, à portée de main mais qui nous échappe, nous partageons ces heures à se retourner dans nos lits à se laisser gagner par l’épuisement. Je voudrais que ce soit un rêve, là où tout est permis, me lover contre lui, l’étreindre, l’embrasser de force. Le sommeil reflue peu à peu, je me demande ce que je fais si près de lui, je sens ses bras qui m’entourent, qu’est-ce que je fais dans des bras étrangers, ce n’est pas lui que j’ai choisi, ce n’est pas lui ma prison dorée. Je remue un peu, je n’ai pas vraiment envie de me dégager mais il faut bien que je fasse mine, pour la forme. J’ai l’impression confuse qu’il connait mes intentions, mes désirs, peu importe ce que mon corps lui prétend, j’ai l’impression qu’il lit dans mes pupilles, j’ai toujours eu confiance dans sa capacité à cerner les gens et la langueur qui me berce ne m’aide pas à faire semblant.
Il me ramène un peu plus contre lui, nos visages se touchent presque. « J’aimerai… j’aimerai pouvoir… » murmure-t-il, j’entends un corps froisser les draps non loin de moi, soudain j’ai peur qu’on nous surprenne, même si nous ne faisons rien de mal. Le désir me vrille la poitrine, ces quelques mots c’est comme un aveu, je sens ses mains s’enfoncer dans la peau de mon dos, comme s’il voulait me posséder, ces quelques mots c’est une porte ouverte à un possible doux comme de la soie et claquée aussitôt avec violence. Moi aussi, j’aimerai pouvoir. Dans la fièvre de la fête, dans l’ivresse du sommeil, j’aimerai me donner à lui, consommer un désir qui me hante depuis notre rencontre. L’atmosphère est chargée d’électricité, son étreinte c’est tous les mots qu’on s’est pas dit, c’est tous les sentiments qu’on a refusé d’éprouver l’un pour l’autre, c’est notre union, je sens son désir et son affection presque palpables, elles font écho aux miens. Bien sûr, nous n’avons jamais été l’un pour l’autre, mais c’est bon de rêver, protégés par le cocon de la nuit, tapis sous les draps, comme si personne ne pouvait nous voir, comme si personne ne pouvait nous entendre, comme si ce n’était pas une petite trahison de se laisser aller quelques instants, dans les bras l’un de l’autre, au désir fugace que nous avions un jour éprouvé l’un pour l’autre et que nous ne consumerons jamais, qui restera enfoui au fond de nos pensées bouillonnantes, la trame d’un autre avenir, peut-être pas meilleur que celui qui s’offrait à chacun de nous (car nous ne ferons jamais un), mais qui gardera l’éclat du rêve.

Mercredi 8 février 2012 à 13:06

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Une vie faites de bouts de ficelle, des morceaux d’existence, dans l’espoir que le patchwork en fasse une vraie vie, une vie avec un cœur qui bat. Pourquoi je ne sens pas mon cœur battre.

Je suis restée toute la nuit avec lui, une nuit de confidences et d’étreintes, j’aurai pu ronronner tellement j’étais bien, pendant un moment j’ai cru être amoureuse, et puis je me suis rhabillée.
Ma vie, usée par le vent, un peu râpeuse, sous les doigts d’avoir trop servie.
Le répertoire plein de numéros que je n’ose pas appeler. J’aime croire que c’est moi qui ai le pouvoir, que je laisse sur les âmes une marque indélébile, une cicatrice qui n’en finit pas de brûler, mais je ne laisse qu’une griffure qui s’estompe avec l’aube. Je ne suis pas une fille qu’on a envie de revoir. Je ne suis pas une fille à laquelle on pense pendant qu’on l’étreint.
Les hommes sont comme des épines, je saigne et puis j’oublie. Certains essaient de me mettre à nu avec des mots, on se demande bien ce qu’ils espèrent trouver entre mes os, moi j’aurai peur d’y trouver des organes putréfiés, des chairs à l’agonie, des veines nécrosées, moi j’oserai jamais forcer quelqu’un à ôter son masque.
Comment on fait pour lâcher prise, comment on fait pour ne plus pourrir, comment on fait pour se sentir en vie ?
J’ai perdu le mode d’emploi, je n’ai même plus mal, mes pensées et mes angoisses s’écrasent à mes pieds comme des vagues, leur tapage n’est qu’un lointain murmure, je ne pense plus, je me laisse bercer par l’inconsistance du quotidien, je suis sédatée. Même baiser, ça semble compliqué. J’ose pas rappeler.
J’avais encore envie d’aimer, mais les embryons de mes romances tombent à mes pieds, c’est un charnier. Alors je couds un nouveau lambeau à ma vie effilochée.

Mercredi 8 février 2012 à 12:54

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Elle avait finit par prendre sa décision (acculée par la langueur, trahie par son corps dégoûté), ou plutôt, pour mettre en application sa décision, sa volonté de partir était établie depuis longtemps.
Pour Aurélien, ça avait été facile. Il suffisait de ne pas répondre à ses messages épisodiques. De toute façon, c’était fini depuis longtemps, c’est juste qu’ils faisaient semblants.
Pour son Prince, elle aurait voulu organiser la rupture, pour le préparer en douceur, attendre le bon moment… Il n’y a jamais de bons moments. Elle avait aimé suffisamment de fois pour ne pas avoir l’impression de laisser un morceau d’elle-même en le quittant, peut-être qu’à force d’aimer elle était devenue frileuse, avare d’elle-même, peut-être qu’elle attendait cet instant depuis suffisamment longtemps pour avoir ramassé tous les morceaux qu’elle avait semé dans le cœur de son partenaire. Mais finalement, les mots lui échappèrent. Ils sortaient les uns après les autres, précipités, compacts. C’était pourtant une soirée comme les autres, ils étaient chez lui, attablés, ils parlaient de leur journée, de leurs travaux de recherche, des imbéciles qu’ils avaient croisés, et soudain elle dit, elle s’entendit dire « je veux rompre ». Il lui lança un regard un peu peiné et résigné, ils échangèrent quelques paroles creuses pour combler le vide qui venait de s’engouffrer dans leurs vies, elle répondit aux inévitables questions avec un peu de vérité, un peu de silence et un peu de mensonge, elle tentait de laisser derrière elle une plaie propre, nette, facile à cicatriser et la vérité importe peu dans ces cas-là, et ils se dirent au revoir. C’était aussi simple que ça.
Enfin libre, elle rentra chez elle. Soulagée. Dès le lendemain, cette histoire lui semblait appartenir à un passé lointain.

Mercredi 8 février 2012 à 12:50

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Elle s’ennuyait. Et comme tous les gens qui s’ennuient, elle rêvait de s’envoyer en l’air. Oublier qu’elle était censée être lisse et polie et plaquer les deux hommes qui rongeaient sa vie par texto, par soupirs, par post-its sur le frigo. Pas de drames, pas de larmes. Elle se disait qu’elle devrait disparaitre, réapparaitre à des lieues de là, lourde de ses histoires qu’elle pourrait conter le soir à des amis de passage, comme une histoire inventée, elle pourrait être une barde des temps modernes. Elle pourrait même tout avouer à son Prince, son officiel, l’ex-homme de sa vie, laisser en évidence une preuve compromettante de sa double vie, de sa trahison, pour lui laisser la satisfaction de la confondre. Et puis elle se dit qu’il serait capable de lui pardonner, de la supplier ou d’exiger, ce n’était pas la peine.
Et quelle double vie, en effet. C’était plutôt une demi-vie, une vie sous assistance respiratoire, une vie qui n’en finit pas d’agoniser.
Elle ne voyait presque plus Aurélien, elle redoutait leurs rendez-vous et pourtant elle guettait ses coups de fils, ses rares attentions, car penser qu’il était sous sa coupe était trop confortable pour qu’elle renonce facilement à cette idée. Leurs étreintes étaient brèves, expédiées, décevantes.
Quant à son officiel, elle frissonnait de dégoût quand il la touchait (non, ce n’était pas du dégoût, juste une lassitude physique, une saturation de l’épiderme qui brulait de se tordre sous d’autres mains), mais elle le laissait faire, elle voulait avoir la paix. Avec lui, elle ne se sentait plus vivante.
Alors elle fuyait, elle allait dans l’appartement de l’officiel quand elle savait qu’il ne s’y trouvait pas, feuilletant ses livres, lovées sur le canapé, humant l’odeur familière et écœurante de son Pygmalion, elle partait en catimini avant son retour. Partir, ça elle savait faire. Mais elle n’avait pas encore le cran de partir pour de bon, sa vie sonnait creux mais elle était douillette.

Mercredi 11 janvier 2012 à 16:24

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Avant de me prendre un procès pour diffamation, mauvaise publicité, atteinte à l’image et autres dénominations juridiques pour pourrir quelqu’un qui vous a déjà pourri, je préfère écrire tout de suite une chronique évoquant cinq bonnes raisons de s’inscrire sur un site de rencontres (parce que si on voulait éviter tous les boulets, on ne sortirait plus de chez soi, la confrontation est quotidienne dans le monde social), pour vous mesdames (par simple souci d’accord des pronoms, mais c’est sans doute réversible).
-          Préserver sa santé. En effet, dans le monde réel, pour rencontrer des gens et souscrire à des offres sentimentales (voire purement physiques) avec ou sans engagement (l’emploi du pluriel n’est pas anodin), il faut sortir (souvent), boire (pas mal), se forcer à rire (bêtement) et rentrer (tard) parfois seule. Autrement dit, vieillir de dix ans par semaine. Les sites de rencontres ont l’avantage d’être à porté de clic à n’importe quel moment de la journée. Bien sûr, en cumulé, ça vous prendra autant de temps que si vous aviez dansé sur les tables dans un bar quelconque une ou deux fois par semaine et il y a des chances que ce soit moins amusant, rien que pour sélectionner les heureux élus parmi les moult prétendants qui ne manqueront pas de se bousculer à votre porte virtuelle (avantage des boulets : ils sont pénibles, mais ils sont bons pour l’ego), mais au moins vous pouvez vous coucher de bonne heure et vous réveiller sans gueule de bois. Un plaisir rare.

 
-          Une concentration supérieure à la moyenne de gens intelligents. Vous connaissez sûrement ce sentiment de désespoir : en dehors des étudiants en master et en doctorat en sciences humaines (pardon, pas de pub), la conversation des hommes n’est souvent pas très profonde. Je ne dis pas qu’on s’ennuie nécessairement avec eux, on peut beaucoup s’amuser dans une conversation des plus banales (surtout s’il s’agit de critiquer des connaissances ou des inconnus), mais parfois, on aspire à plus, on voudrait échanger des points de vue, apprendre des choses… bizarrement, on en rencontre rarement en boite de nuit (enfin, c’est peut-être qu’on ne prend pas la peine de les faire parler). Bref, les sites de rencontre sont là pour vous, vous pouvez opérer une sélection totalement élitiste et snob : bloquez les mecs qui font trop de fautes d’orthographe ou qui croient que le langage SMS a été agréé par l’Académie française, ignorez ceux qui écrivent des mails de moins de cinq lignes ou qui vous font parler de leurs vacances, exigez un compte-rendu de ses lectures récentes en préalable à tout rendez-vous (en plus avec un peu de chance ça vous fera un sujet de conversation) et éconduisez-les s’ils ne se souviennent pas.

 
-          La négociation de la relation. Mettre une option sur une offre en soirée, c’est compliqué. Si vous avez de la chance, l’offre s’approchera de vous de sa propre initiative et le verre qu’il  vous offrira et son œil lubrique définiront clairement le programme de la soirée. Ça, c’est ce qui se passe dans le monde des Bisounours des séries/films états-uniens. En temps normal, vous ne savez pas forcément si l’homme vous aborde/rejoint le groupe de conversation où vous évoluez ou accepte de discuter avec vous parce que c’est quelqu’un de sociable qui aime rencontrer de nouvelles personnes ou parce qu’il a déjà déshabillé mentalement toutes les filles de la salle et que, définitivement, vous avez le meilleur ratio baisable/potentiellement consentante. Donc vous risquez de rentrer seule et (plus grave) sans numéro à appeler. En général, les mecs, même en soirée, ont la décence de discuter un peu avec vous avant de fourrer leurs langue dans votre bouche, surtout dans une soirée où il connait des gens et à plus forte raison où il est connu (c’est-à-dire des genre qui risquent de se moquer de lui jusqu’à le fin de ses jours si la chasse n’est pas dans les mœurs de leurs soirées) et où on ne sait pas forcément quand c’est le bon moment de passer à l’assaut (ni si assaut est possible). Ces obstacles franchis, vous l’invitez à prendre un dernier verre, il propose de vous raccompagner, voire un des deux a lancé le très explicite « on va chez moi ? », bref, vous savez ce que vous attendez l’un de l’autre à court terme. Le problème se pose à nouveau le lendemain matin. Ne pas prendre le numéro de la personne, c’est un peu rude, surtout si ça ne s’est pas trop mal passé (je parle de la conversation, bien sûr). Surtout que si on a mis le grappin sur un homme qui soit à la fois célibataire, pas trop mal physiquement et pas trop crétin, on n’a pas envie de le laisser filer. Mais pas forcément facile de deviner les attentes de chacun (coup d’un soir, coup de plusieurs soirs, amitié câline, relation hétéro-normée impliquant fidélité et affection mutuelle ?), et aborder le sujet, c’est quand même assez inconfortable, on a toujours l’espoir que les actes parlerons d’eux-mêmes et que la définition de la relation d’imposera. D’où incompréhensions, mises au point sanglantes, drames, cœurs brisés… Bref, la vie est dure. Avec les sites de rencontres, vous avez déjà une segmentation de la demande. On ne cherche pas la même chose suivant le site sur lequel on est inscrit. Ensuite, si vous êtes un être humain intelligent, vous devriez avoir la présence d’esprit de préciser un peu ce que vous cherchez comme relation, au moins à mots couverts (même si en pratique la majorité des gens cherchent « une relation sérieuse » pour éviter de passer pour un connard/une salope. Clichés quand tu nous tiens…). Enfin, si vous avez une vraie conversation avant la rencontre (voire une vraie conversation pendant la rencontre), la question devrait être abordée à un moment ou l’autre, et ce sera l’occasion d’échanger des opinions assez oiseuses sur les relations amoureuses et la nature de l’amour, youpi. En tous cas, on sait pourquoi on est là : potentiellement s’envoyer en l’air, et plus si affinités. Au pire, il y en a qui sont suffisamment explicites pour éviter tout malentendu : on se retrouve chez l’un des deux, on grogne, on besogne, on se fait des massages (non, je plaisante, ça c’est la phrase codée pour « on grogne et on besogne »), on se dit au revoir et on se rappelle si ça a bien collé. Après tout, on est au XXIème siècle.

 
-          Vous faire inviter. Bizarrement, la plupart des hommes sur les sites de rencontre déclarent que « en direct, c’est mieux, quand même » et il y en a un certain nombre qui vous proposent un rendez-vous après deux échanges de banalités. Comme on les comprend, ils veulent vérifier la marchandise (même si officiellement c’est que « en face, c’est quand même plus sympa », et « on ne sait jamais vraiment si ça va coller avant de se rencontrer » et bien sûr « on risque de se faire une fausse idée de la personne si on attend trop »). Je vous dis ça pour que vous soyez méfiantes. Toujours vérifier le nombre de messages et le contenu avant d’accepter un rendez-vous. Même si ça fait plusieurs jours que vous vous parlez, si vous n’avez parlé que de la pluie et du beau temps par mail, il n’est pas impossible que vous vous rendiez compte en direct que vous n’avez rien en commun. Croyez-moi, c’est très gênant. Si jamais vous êtes faible comme je le suis et que vous êtes trop polie (ou prise au dépourvu) pour refuser, même si vous vous rendez compte dans les cinq premières minutes que c’est une énorme erreur de casting (c’est marrant, sur les photos il faisait 5 ans de moins), que vous n’avez rien en commun, que vous ne venez pas de la même planète, que la conversation ne démarre pas, qu’elle retombe en crachotant après un ping-pong verbal de questions sans intérêt, que vous être trop bien élevée pour prendre la fuite mais que vous ne savez pas comment vous en défaire, bref, que vous vous ennuyez comme un rat mort, réjouissez-vous ! Vous êtes en train de boire à l’œil ! Car les mecs des sites de rencontre invitent (c’est très étrange, on est pourtant en post-mai 68, non ?), contrairement à la plupart des hommes de soirées (soit parce que c’est dans un espace privé et donc que le verre ne s’achète pas, il se vide ; soit parce qu’ils n’ont pas le cran/l’opportunité d’offrir un verre dans un bar ou en boite). Prenez-en un deuxième (rapidement, car rappelez-vous que le consommer retarde le moment où vous carapater manière acceptable socialement), en plus ça vous donnera peut-être des idées de sujet de conversations.

 
-          Un sujet de conversation tout trouvé. Dans les soirées, après que vous ayez fait le tour du prénom (que vous avez déjà oublié), de l’occupation courante (étudiant, travail, sans emploi) et de la raison pour laquelle vous avez atterri à la soirée (qui vous a amené, comment vous l’avez connu), c’est parfois difficile de rebondir là-dessus. Grâce au site de rencontres, vous avez au moins un point commun : votre fréquentation du site de rencontres. Sujet bouée de sauvetage, à aborder quand vous n’avez pas atteint la durée minimale de fréquentation mutuelle avant de remercier, vous lever et supprimer ce contact de votre répertoire, en dernier recours donc, car c’est assez glauque. On commence par les classiques, en général il l’abordera de lui-même au début de la conversation : « alors je suis le combien ? ». Une espèce d’obsession du numéro, comme si ça changeait vraiment quelque chose. Il vous demandera comment ça s’est passé, continuité logique, comme si on pouvait résumer 15 expériences différentes en une phrase. Normalement, il devrait y avoir eu du bon et du moins bon, alors faites une moue dubitative, jonglez un peu des épaules, surtout ne grillez pas vos cartouches. N’approfondissez pas le sujet, ne lui retournez pas la question. Plus tard, après un blanc de plusieurs longues secondes et votre premier échange de sourires gênés, vous saurez que c’est le moment de lui demandez « et toi alors, beaucoup de rencontres ? ». Normalement, si on n’a pas peur du sang et des tripes, c’est inépuisable. Plans galères, rencontres bizarres, boulets notoires, profils risibles ou même très bonne rencontre, personne exceptionnelle… c’est assez coûteux émotionnellement, aborder ce sujet, c’est un aveu d’échec et une mise au jour de l’hypocrisie sous-jacente de ce genre de sites : on sait que c’est l’usine, on sait que l’autre rencontre d’autres candidats, d’autres numéros,  on sait qu’on passe un casting sentimental mais tous ces numéros ont l’ambition de devenir l’unique, le seul qui compte. Et même dans les cas d’offres sans engagement, le spectre de la relation socialement acceptable basée sur la fidélité fait qu’il est finalement assez impudique et indélicat d’évoquer les autres offres souscrites, même si cela ne constitue pas une forme de trahison, même s’il n’y a pas de jalousie. Bref, même en cas de conversation profondément foireuse, vous pouvez sauver les meubles. D’un autre côté, en soirée, vous pouvez capitaliser sur le fait que vous n’êtes pas tenu de prolonger le face-à-face, voleter vers une autre conversation voire appeler un ami à la rescousse pour mettre de la distance entre l’alien auquel vous n’avez rien à dire et vous. Mais bon, il me fallait une 5ème raison.
Bref, les sites de rencontres sont un excellent moyen d’amorcer son entré dans le marché de l’offre et de la demande sentimentale et sexuelle, si on n’est pas super sociable et dépravé. C’est vrai que vous serez harcelées par des boulets ou des gens qui vous sont tellement étrangers que vous ne saurez pas de quoi parler. Mais bon, avec beaucoup de chance, vous tomberez sur quelqu’un de suffisamment mignon pour ne pas avoir à discuter.

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