cigarette-and-coffee-milk

Jeudi 28 juillet 2011 à 17:06


Ils avaient échangé quelques mots, puis des sourires gênés, ils ne se connaissaient pas assez pour savoir comment être familiers. Elle voulait lui annoncer ses résultats aux concours mais n’étaient-ils pas évidents puisqu’elle se trouvait dans cette cour ; elle voulait lui parler de ses cours et de ses professeurs mais elle avait peur de gaffer (elle pourrait se plaindre du professeur qu’il admirait, elle était encore novice) ; elle voulait parler de son ancien lycée, là où elle l’avait rencontré mais elle avait peur de l’ennuyer. Alors elle lui souriait, en cherchant fébrilement une amorce de conversation parmi celles qu’elle avait composées dans ses rêveries.
Mais ce fut lui qui pris l’initiative, il lui demanda « vous êtes libre là, tout de suite, vous avez le temps de prendre un café ? ». Il voulait donner forme à leur rencontre. Faire connaissance à trois ans de retard. Un peu surprise, elle lui avait dit oui. Comment se dérober ?
En marchant vers le café le plus proche, aucun mot ne fut échangé, la marche leur donnait une contenance, leur laissant le temps de réfléchir à ce qu’ils pourraient se dire. Il fut même tenté de l’entrainer plus loin, vers un autre bar, vers un autre café, pour faire durer cette promenade, cette parenthèse aussi longtemps que possible mais déjà elle franchissait la porte du café.
Une fois installés à une table, deux tasses fumantes devant eux, ce fut plus facile. Leurs retrouvailles prenaient sens. Il la fit parler de ses études, de ses projets, de ses goûts, se laissant bercer ar le flot de ses paroles. A mesure qu’ils se détendaient, ils commencèrent à plaisanter, à discuter pour de bon. A un moment, elle parla de son ancien lycée, de ceux qui l’avaient remplacé. « Il y en a un, c’est une vraie plaie, une espèce de pervers malsain et irrespectueux. Et il y en avait un autre, il vous ressemblait. Il était gentil, vraiment sympa, et on apprenait toujours quelque chose avec lui. Et lui, il se souvenait toujours de nos noms. Mais bon, sans vous, la dernière année n’était plus pareil » ajouta-t-elle avec un petit sourire. Il se sentit gêné tout à coup, il n’avait pas imaginé que…, enfin peut-être parfois, mais de façon vague, pas sérieusement, il avait quand même dix ans de plus… et puis flatté bien sûr, un peu ému peut-être. Il ne savait pas s’il devait mettre fin à leur rendez-vous ou faire comme si de rien n’était, puisqu’après tout ce n’était qu’une remarque de rien, peut-être de la nostalgie, une remarque en l’air. Mu par une impulsion, il étreignit vivement sa main, quelques secondes, avant de se retirer vivement.
Lorsqu’ils décidèrent de se séparer, il insista pour l’inviter. Au moment de se séparer, ils se dirent à bientôt, puisque de toute façon ils allaient se revoir, ils avaient même échangé leurs numéros. Voilà, c’était fini.
Mais ils sentaient confusément que s’il la laissait partir, comme ça, ils ne se rappelleraient jamais, ou si, peut-être qu’ils se reverraient mais ça ne prendrait jamais, ça resterait une relation formelle, distante, épisodique. Il sentait que c’était le moment où tout pouvait encore arriver. Il comprit qu’il pouvait devenir un Pygmalion et elle sa Galatée. Alors il l’embrassa. Brusquement, passionnément. Il lui proposa d’aller chez lui, pour faire de l’irréversible, pour franchir un seuil. C’était plus que ce qu’elle attendait.

La discussion continue ailleurs...

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